L’oiseau buveur

L’oiseau buveur se comporte comme un moteur thermique qui fonctionne entre une source chaude (l’atmosphère environnante) et une source froide (la zone humide autour de son bec). Le mouvement de bascule est provoqué par la circulation d’un fluide entre deux réservoirs d’un tube scellé, la position d’équilibre variant en fonction de la quantité de fluide dans l’un ou l’autre des réservoirs.

Fiche d’accompagnement de l’expérience: 

logo matérielMatériel
  • un oiseau

  • un support

  • un verre

  • de l’eau

logo montageMontage et réalisation

Le corps de l’oiseau est constitué d’un tube cylindrique qui relie deux réservoirs sphériques identiques, l’ensemble étant en verre.
Le tube ouvre directement sur le réservoir du haut tandis qu’il plonge jusqu’au fond du réservoir inférieur.
L’oiseau peut tourner autour d’un axe horizontal.
Il est rempli de dichlorométhane pur sous deux phases, liquide et vapeur.
Le bec de l’oiseau est recouvert d’une couche de feutrine qui peut s’imbiber d’eau liquide.

  • remplir le verre d’eau

  • le placer de telle sorte que le bec de l’oiseau plonge dans le verre dès qu’il bascule

  • laisser osciller l’oiseau autour de son axe après avoir plongé son bec dans l’eau

logo explicationExplications

Le fonctionnement de l’oiseau buveur se décompose en plusieurs étapes.

  • Mouillons le bec de l’oiseau et abandonnons le sans vitesse initiale (1).
  • Le dichlorométhane est entièrement contenu dans le réservoir du bas et le tube plonge dans le liquide(1).
  • Le dichorométhane contenu dans le réservoir du bas se dilate à cause de la température de l’air ambiant et fait monter le liquide dans le tube (2).
  • L’évaporation de l’eau imbibant la feutrine provoque un refroidissement du réservoir du haut engendrant une baisse de pression dans celui-ci et donc une aspiration du liquide vers le haut (2).
  • Au fur et à mesure que le liquide monte dans le tube le centre de gravité se déplace vers le haut et induit le basculement de l’oiseau(3).
  • Lorsque le bas du tube émerge du liquide contenu dans le récipient du bas,cela permet le passage d’une bulle de gaz de dichlorométhane (4), rendant alors possible le reflux du liquide contenu dans le tube vers le réservoir du bas (5).
  • L’oiseau revient dans une position proche de la verticale(6) et le mouvement se reproduit jusqu’à ce que le bec de l’oiseau ne trouve plus d’eau pour se ré-humidifier.En réalité, l’oiseau peut fonctionner sans intervention extérieure pendant plusieurs heures, voire quelques jours.
    L’animation suivante reprend la figure précédente :

Quel est le phénomène physique qui permet à l’oiseau buveur de se comporter comme un moteur thermique ?
Pour qu’un moteur thermique puisse fonctionner, il lui faut une source chaude et une source froide.
Le réservoir du bas est dans l’atmosphère ambiante à la température normale d’une pièce d’habitation et constitue la source chaude.
Le bec de l’oiseau, mouillé, est également plongé dans l’atmosphère ambiante. Si celle-ci n’est pas saturée en vapeur d’eau, l’eau absorbée par la feutrine du bec de l’oiseau s’évapore en trouvant son énergie sur la paroi de verre de la tête de l’oiseau, ce qui la refroidit par rapport à la température ambiante et constitue la source froide.
L’oiseau ne contient pas d’air mais du dichlorométhane qui se trouve dans 2 phases: une phase liquide et une phase vapeur au dessus du liquide.
Le dichlorométhane en équilibre sous sa phase vapeur et sa phase liquide peut passer rapidement d’une phase à l’autre sous l’effet de très faibles variations de température.
Lorsque l’eau du bec de l’oiseau s’évapore elle produit un refroidissement du réservoir supérieur et donc une condensation des molécules de dichlorométhane et une baisse de pression dans ce réservoir donc une aspiration du liquide vers le haut.
Le réservoir du bas chauffe le dichlorométhane sous forme gazeuse engendrant une augmentation de pression et donc un refoulement du liquide vers le haut. Mais si le liquide monte dans le tube, le volume de gaz devrait diminuer dans le réservoir du bas ce qui s’opposerait à la montée du liquide dans le tube. En réalité la température ambiante étant constante, la pression restera constante car il se produira un équilibre liquide-gaz au niveau de l’interface liquide-gaz dans le conteneur du bas.
Les deux effets combinés font monter le liquide et déséquilibre l’oiseau jusqu’à ce qu’une bulle de dichlorométhane gazeux du réservoir du bas monte dans le tube jusqu’au réservoir du haut et permet le reflux du liquide vers le bas.

Explication plus mathématique (niveau universitaire) :

Pourquoi le dichlorométhane monte-t-il dans le tube?

L’enthalpie massique de vaporisation du dichlorométhane est donnée en fonction de la pente
de la courbe de pression de vapeur saturante par la formule de Clapeyron  :


et
sont le volume massique du dichlorométhane sous forme vapeur ou sous forme liquide.
On traitera la vapeur comme un gaz parfait et on fera l’approximation

si on est loin du point critique.
Calculons

au voisinage de

en fonction de

avec





on a


soit

On suppose pour simplifier que le tube est fixe et vertical. Du fait de l’évaporation de l’eau sur le feutre, le récipient du haut est à une température

légèrement inférieure à la température

du récipient du bas. Le liquide monte dans le tube jusqu’à une hauteur d’équilibre
.
On suppose pour simplifier que le niveau de la surface libre dans le réservoir du bas reste pratiquement constant car le tube est suffisamment fin.
Etablissons l’expression de

sachant que la masse volumique du dichlorométhane liquide est:

Pour un liquide incompressible, la condition d’équilibre est:

or

et donc

Quelle est la valeur de qui permettra au dichlorométhane d’atteindre le réservoir du haut (la longueur du tube est de 6cm):

Pourquoi le récipient supérieur reste-t-il froid?

On envisage le système fermé constitué initialement de l’oiseau et de l’eau liquide qui imbibe son bec au cours d’une phase d’ascension.
A la fin de l’ascension, un volume

de dichlorométhane liquide est monté vers le récipient supérieur, sa température diminuant de
et une masse d’eau liquide

est passée à l’état vapeur dans l’atmosphère qui impose sa pression constante p. On suppose que le reste du système n’a pas évolué.
On rappelle que la longueur du tube vaut :
.
Calculons la variation d’enthalpie du système sachant que :
l’enthalpie massique de vaporisation de l’eau vaut :

la masse volumique du dichlorométhane liquide est :

sa capacité thermique massique vaut :
donc

On néglige les échanges thermiques avec l’extérieur et le travail du poids.
On admet que l’évaporation de l’eau équivaut à une évolution à la pression constante p imposée par l’atmosphère.
Le système évolue alors de manière adiabatique et sous pression extérieure constante donc

la variation de la masse du liquide est alors:

la variation du volume de liquide est :

sachant que la surface du feutre imbibée est d’environ

qui est très inférieure à l’épaisseur du feutre imbibé d’eau.
Calculons l’ordre de grandeur du travail de pesanteur :

or
l’enthalpie du liquide vaut :

L’erreur commise en négligeant le poids est de 1%.

Pourquoi l’eau s’évapore-t-elle sur le feutre?

L’eau se répartit entre la phase liquide qui imbibe le bec en feutre et la phase gazeuse où elle constitue un mélange idéal de gaz parfaits avec l’air. On admet que l’enthalpie libre totale du système fermé constitué de l’eau répartie entre les deux phases et de l’air dans la phase gazeuse s’écrit :



est le nombre de moles d’air supposé constant, x la fraction molaire en vapeur d’eau dans la phase gazeuse,

la pression de vapeur saturante de l’eau à la température T et p la pression atmosphérique.
G est le potentiel thermodynamique à pression et température fixées.
Étudions les variations de G(x) et traçons l’allure de son graphe pour . Sachant que

et

G est minimale à l’équilibre

La dérivée de G s’annule pour

C’est un minimum : l’équilibre est stable.
L’eau qui imbibe le feutre du bec peut s’évaporer dans l’air tant que

Si on enferme l’oiseau sous une cloche hermétique, on constate que l’oiseau finit par cesser d’osciller, bien que son bec soit encore mouillé.
A l’intérieur de la cloche, x augmente au fur et à mesure que l’eau s’évapore. L’oiseau cesse d’osciller lorsque

logo remarquesRemarques

Cependant, le mouvement de l’oiseau n’est pas perpétuel pour deux raisons.
La première c’est que l’oiseau va s’arrêter lorsque toute l’eau sera évaporée, et que le réservoir du haut ne pourra plus se refroidir, ce qui arrive généralement au bout de 2 à 3 semaines.
La deuxième raison c’est que si on disposait d’une source d’eau conséquente, l’oiseau s’arrêterait lorsque le milieu où il est situé serait saturé en eau, et donc lorsque l’eau ne pourrait plus s’évaporer.

logo référencesRéférences